lundi 2 décembre 2013

Dernier voyage vers mon père

   


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Le roulis vague du train
Imprime, en moi,
Un si languissant refrain :
Le brouhaha des voies .

Une fillette s'ennuie
Sous une annonce qui rassure.
Patient tremblement, son babille sans vie,
Troue le feutre des murmures.

Dans les silences d'ouate, on les entend,
Interjections soudaines en forme d'apocalypse,
Elles s'imposent longtemps,
Pointues, coupantes comme du gypse.

Allées et venues de voyageuses,
Tendues, comme à la chasse.
« Nous sommes les travailleuses,
Rapaces ! Faites nous une place !  »

Venue de loin, une odeur
De jambon, fade, m'écœure :
Vulgaire, elle s'étire sans nuance.
Et fine, ma narine, guette celle du beurre rance.

Sous le pied, au sol appuyé,
Tressaille la bête tendue du voyage.
Une nuit, de lumières déchirées
Annonce des heures tristes. Présage !

Iles et ailes.

Il regarde Elle
Elle regarde Lui.
Regards qui se cherchent, œil qui fuit .
Ils ne se voient pas.
L'un rit quand l'autre tremble.
L'un s'interroge, le second se dérobe.
Chassé croisé d'œillades mal séquencées;
L'iris s'éternise quand la tête chemine.
Nulle rencontre. Rien qu'un rendez-vous manqué.


Il est déjà trop tard, et le train est passé.
Il ne regarde plus Elle.
Elle ne voit plus Lui.
Ne restent que des battements d'yeux.
Veules et dignement tristes :
Instants mort-nés.
Leurs esprits vont à tire d'ailes,
Vers deux îles opposées.


L'orgueil est un mode dépassé



Ombre sans lumière,
Fuite sans histoire...
Chaque visage est un mystère,
Chaque esprit, un ostensoir.
Qui es-tu toi que j'aperçus ?
Âme, à peine un instant, saisie,
Sache que l'Orgueil est un mode dépassé.

Nous ne sommes que d'infimes images,
Dans un film qui danse
Et passe trop vite vers sa nuit.
Si pleins de morgue, certitudes et importance.
Rien pourtant, face au sablier qui fuit :
Sais-tu que l'Orgueil est un mode dépassé ?

Nos silences sont des morts vécues,
Le temps, une expérience sans reçu.
Nos vides se peuplent de babioles,
Se forcent à oublier nos tristesses et même s'affolent.
L'Orgueil, vois-tu, est un mode dépassé,
Et l'existence en devient un chemin épuré.
Le temps glisse, insaisissable serpent,
Car, bien tôt, la mort nous rend à nos néants.




La mort du vieil homme


La tête posée aux mains de ses fils,
Il est mort le vieil homme
Dans le silence recueilli.
Libre, en somme,
Dans un dernier hoquet, il est parti.
Et blanc, sur une table, posés, un lys
Mêlé à quatre roses rouges.



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